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Gestion de l’eau : ne pas céder à la pression et poursuivre la concertation

Suite aux demandes des chambres d’agriculture des Pays de la Loire de mettre en pause les réunions et études sur la question du partage de l’eau, nos associations réagissent et demandent aux acteurs publics de maintenir les échanges et de leur garantir un cadre cohérent et protecteur. Nous adressons une lettre ouverte au Ministre de l’Écologie :

Image d’illustration : Pixabay

Le 9 février 2024,

Monsieur le Ministre de l’Écologie,

Comme nous l’avons indiqué à la préfète de bassin, nous avons appris que les représentants de Chambres d’agriculture des Pays de la Loire avaient enjoint au préfet de Région de demander la suspension de travaux et réunions sur l’eau, en particulier sur les études HMUC (Hydrologie, Milieux, Usages, Climat). Ces études, menées au sein des SAGE (schémas d’aménagement et de gestion de l’eau) et suivies par les CLE (commissions locales de l’eau, instances regroupant plusieurs acteurs de l’eau), ont pour but de mieux connaître le fonctionnement des milieux aquatiques et les prélèvements en présence afin de définir l’eau disponible pour tous nos usages dans une perspective de changement climatique.

De telles pratiques sont inadmissibles et reflètent à la fois le mépris et le faux-semblant de ces acteurs pour le juste partage de l’eau.

Il nous paraît important de rappeler à tous les acteurs de ne pas céder à cette pression et de poursuivre les échanges actuellement menés, dans un climat de dialogue, pour- l’intérêt général, y compris celui du monde agricole. Les concertations menées au sein des CLE (commissions locales de l’eau), suivies de manière appliquée et impliquée par nos représentants associatifs, des élus, des consommateurs… mais également par de nombreux agriculteurs ont justement pour but d’anticiper les crises à venir sur le partage de l’eau. Elles ont pour but d’établir un diagnostic scientifique solide et partagé afin de mieux répartir la ressource entre les usages essentiels, dans le respect des milieux naturels.

Se prévaloir de la détresse sociale exprimée par les agriculteurs pour demander de geler les discussions sur le partage de l’eau est un prétexte injuste et injustifié. D’autant plus que les démarches en cours résultent déjà d’un compromis obtenu par la chambre régionale d’agriculture des Pays de la Loire : l’engagement des territoire dans des études HMUC avec la définition d’un plan d’action (démarche PTGE – projet de territoire pour la gestion de l’eau) était la condition pour ne pas entrer dans un cadre réglementaire plus protecteur de la ressource en eau qui s’imposait pourtant dans des bassins en déficit. Les premiers résultats étaient attendus pour fin 2023 au plus tard : non seulement suspendre les réunions et études retarderait encore plus l’atteinte de cette échéance mais certains acteurs soulèvent également le blocage de plusieurs représentants agricoles au sein du processus, avec peu de considération pour les milieux aquatiques et les efforts proposés par les autres acteurs… Tout cela alors que la chambre régionale d’agriculture bénéficie de financements publics de l’Agence de l’eau pour normalement faciliter les politiques de l’eau : les masques tombent.

Un cadre cohérent et protecteur est donc indispensable et doit être porté par les acteurs publics. Les réglementations environnementales ne sont pas les responsables de la crise agricole, elles viennent au contraire garantir de bonnes pratiques, qui sont ensuite inéquitablement mises en concurrence et mal rémunérées par notre système agro-alimentaire actuel. Avoir une eau de qualité, des milieux naturels résilients et qui fonctionnent, une eau en quantité suffisante justement répartie entre les acteurs qui en préservent la qualité… est tout autant nécessaire aux agriculteurs qu’aux autres usagers. Et cela sera permis par un cadre qui doit résulter d’une concertation et d’échanges apaisés : cela ne pourra être le cas si un des usagers, via ses représentants, peut se prévaloir d’un passe-droit et considère les services de l’État comme une simple chambre d’enregistrement de ses revendications.

Nous vous prions de croire, Monsieur le ministre, en l’expression de nos salutations distinguées.

Antoine GATET, président de France Nature Environnement

Jean-Christophe GAVALLET, président de FNE Pays de la Loire

À propos Noémie MOREL

Chargée de mission eau et littoral