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Destruction d'espèces protégées : une condamnation... post loi d'orientation agricole
Par arrêt du 16 septembre 2025, la cour d’appel d’Angers a confirmé la condamnation d’un exploitant agricole qui s’était rendu coupable d’une destruction d’habitat d’espèces protégées en arrachant une haie bocagère abritant plusieurs espèces. Rendu après l’adoption de la loi d’orientation agricole du 24 mars 2025, cet arrêt vient relativiser la portée de la réforme issue de cette loi s’agissant de la dépénalisation des atteintes aux espèces protégées. Une victoire pour les défenseurs de la biodiversité !
Le 16 février 2021, un arrachage de haies abritant des espèces protégées (Chouette effraie, Grand capricorne) est constaté par des agents de l’Office Français de la Biodiversité à Challain-la-Potherie. Le gérant des sociétés agricoles concernées s’était pourtant vu opposer un refus d’arrachage de ces haies au titre de la conditionnalité des aides de la politique agricole commune (PAC). Des poursuites sont engagées et, le 19 février 2024, le tribunal correctionnel d’Angers condamne l’exploitant agricole pour destruction et altération d’habitats d’espèces protégées.
L’exploitant fait appel de cette décision et, lors de l’audience du 10 juin 2025, met en avant la réforme issue de la loi d’orientation agricole (LOA) du 24 mars 2025 : votée sous pression des tenants de l’agriculture intensive et en particulier de la FNSEA, cette loi prévoit que, désormais, seules les destructions commises de façon intentionnelle ou par «négligence grave» peuvent faire l’objet de poursuites*. A l’audience, l’exploitant tente maladroitement de faire valoir sa bonne foi, expliquant que la haie le gênait pour le regroupement de parcelles auquel il voulait procéder.
Les magistrats ne se sont toutefois pas laissés convaincre et ont retenu que c’est de façon volontaire que cette haie a été arrachée, causant une atteinte aux espèces protégées, dans un contexte où le maintien des haies bocagères est une obligation pour les exploitants qui bénéficient d’aides de la PAC. Parties civiles, FNE Pays de la Loire, FNE Anjou et la LPO Anjou sont ainsi suivies dans leur argumentaire et leur préjudice moral se voit reconnu.
Première décision rendue au stade de l’appel suite au vote de la LOA, cet arrêt relativise fortement la victoire revendiquée par la FNSEA quant à la dépénalisation de la destruction d’habitats et individus d’espèces protégées : en pratique et dans une immense majorité de cas, ce sont bien les cas de négligences graves voire d’atteintes intentionnelles qui font l’objet de verbalisations de la police de l’environnement et de poursuites de la part des parquets.
Cette décision réaffirme par ailleurs l’importance de l’enjeu de préservation des haies dont la disparition très rapide (70 % en 50 ans) contribue à l’érosion catastrophique de la biodiversité (perte de 60 % des effectifs d’oiseaux de milieux agricoles en 30 ans). Elle vient également saluer le travail des agents de l’Office Français de la Biodiversité, dont l’enquête est à l’origine des poursuites. De leur côté, nos associations continueront à porter plainte et se porter parties civiles lorsque de tels faits seront commis.
* L’une des premières moutures du texte ne prévoyait d’infraction qu’en cas d’atteinte intentionnelle. Contraire au droit européen, cette version du texte a été fortement combattue par les associations environnementales, FNE en tête, qui ont obtenu gain de cause sur ce point.
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