Biodiversité, Communiqués de presse, Mer & littoral

L’Etat empêchera-t-il les échouages massifs de dauphins cet hiver ?

Chaque hiver, des milliers de dauphins sont capturés dans des filets de pêche. Le principal responsable ? Les pêches non sélectives, dont la pêche au bar au chalut pélagique. Après avoir dénoncé à plusieurs reprises les échouages de dauphins sur la côte Atlantique, France Nature Environnement demande au gouvernement d’agir avant qu’il ne soit trop tard : il faut impérativement suspendre la pêche au bar au chalut pélagique pendant cette période, censée démarrer le premier décembre, avant de nouvelles captures mortelles de dauphins.

Crédit photo : Archive CRMM

 

Des pratiques de pêche néfastes, identifiées, provoquant chaque année une hécatombe

Chaque année, près d’un millier de carcasses de dauphins viennent s’échouer sur les côtes françaises. Et ce n’est que la partie émergée de l’iceberg… puisque la plupart des dépouilles coulent simplement au fond de l’océan. Parmi les carcasses échouées, 90% portent des traces de capture par des engins de pêche[1].

La cause est bien identifiée : de nombreux dauphins sont capturés lors de la pêche au bar, notamment par des chalutiers pélagiques[2], autorisés à pêcher de décembre à janvier. Les dauphins et les bars se nourrissant des mêmes poissons, ils se retrouvent concentrés au même endroit, et sont donc pêchés en même temps. Ces captures sont également le résultat de méthodes de pêche non sélectives (la pêche au chalut pélagique, mais aussi les pêches au filet maillant fixe par exemple). Pourtant, des méthodes de pêche sélectives existent, comme la pêche à la ligne (bar de ligne), qui devrait être la seule autorisée pendant cette période de reproduction du bar.

Une urgence : suspendre la pêche au bar au chalut pélagique en période de reproduction

Face à ce constat, le gouvernement ne peut pas rester passif. Il n’est pas trop tard pour éviter l’hécatombe de cet hiver : les associations du mouvement France Nature Environnement demandent la suspension immédiate de la pêche au bar pratiquée par des chalutiers pélagiques, censée démarrer le 1er décembre. L’objectif est double : protéger les dauphins des captures et assurer la pérennité du bar.

Car en s’intéressant à la pêche au bar par des chalutiers pélagiques, on s’aperçoit qu’en plus des captures de dauphins, elle a un impact direct sur le stock de bars adultes, en déclin depuis 2010[3]. En effet, l’hiver est également la période de reproduction de ce poisson. Comment peut-on le préserver si on l’empêche de se reproduire ?

Face au silence de l’Etat, un fort besoin de transparence

Alors que le Dauphin commun est une espèce protégée par la loi[4] et que l’Etat s’est engagé à réduire significativement les échouages sur les côtes françaises[5], la situation stagne. Pire : la pêche au bar (et les captures qui en résultent) a parfois lieu directement dans des espaces marins qui sont protégés par l’Union Européenne[6]. Un échec en partie dû à un manque d’information et de transparence de la part de l’Etat. France Nature Environnement demande donc :

  • La suspension immédiate de la pêche au bar pratiquée par des chalutiers pélagiques pour cette saison.
  • Un accès au rapport que la France doit fournir à l’Union Européenne chaque année sur les captures de dauphins[7]. Il s’agit d’un document administratif auquel l’accès est normalement autorisé, mais cette demande est jusqu’alors restée sans réponse.
  • Une place dans le groupe de travail sur les captures de dauphins des Ministères de l’Agriculture et de l’Alimentation, et de la Transition Ecologique et Solidaire. La société civile n’y est pas représentée actuellement.
  • La désignation d’un organisme compétent et indépendant, chargé d’analyser les dauphins capturés déclarés par les pêcheurs.
  • La mise en place ou la reprise de programmes de recherche sur les Dauphins communs (pérennité de l’espèce, causes de mortalité). Un renforcement des connaissances est nécessaire.

Pour Elodie Martinie-Cousty, Pilote du réseau Océans, Mers et Littoraux, de France Nature Environnement, « la pêche au bar au chalut pélagique est doublement problématique, à la fois pour les dauphins et les bars. Les impacts sur les populations de Dauphins communs, qui sont pourtant une espèce protégée, sont négligés par les pouvoirs publics. L’Etat doit sortir de son silence et agir avant la nouvelle saison d’échouages ».

 

Associations co-signataires :

France Nature Environnement / Nature Environnement 17 / le Groupe de Recherche sur les Cétacés (GREC) / Ré Nature Environnement / le Centre d’Hébergement et d’Etudes sur la Nature et l’Environnement (Chêne) / Vendée Nature Environnement / la Fédération des Sociétés pour l’Etude, la Protection et l’Aménagement de la Nature dans le Sud-Ouest (Sepanso) / France Nature Environnement Pays de la Loire / France Nature Environnement Nouvelle Aquitaine / Bretagne Vivante.

Pour aller plus loin

Les alertes de France Nature Environnement sur les échouages, en avril 2017 et mars 2018.


[1] Filets, ou tiges utilisées par les pêcheurs pour attraper les cordages. Source : Observatoire Pelagis-CNRS
[2] Bateaux pêchant en pleine mer, en utilisant un filet remorqué mesurant jusqu’à 16 mètres, en forme d’entonnoir
[5] Action 43 du Plan biodiversité, juillet 2018, et Mesure 54 du Comité interministériel de la mer, novembre 2018
[6] Réseau européen Natura 2000

Télécharger le communiqué en PDF